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Victime présumée de harcèlement au travail : pourquoi est-il difficile de recueillir des faits précis lors de l’entretien ?

  • Photo du rédacteur: Anaïs Cejudo
    Anaïs Cejudo
  • 7 juil.
  • 2 min de lecture

L’entretien avec une personne se déclarant victime de harcèlement est donc une étape décisive dans toute procédure d’enquête interne. Or, il n’est pas rare que les faits rapportés manquent de précision. Ce flou apparent peut déstabiliser l'enquêteur, voire faire naître des doutes quant à la véracité des propos.

Pour autant, l’imprécision du récit ne signifie pas nécessairement qu’il est infondé. Elle peut refléter un vécu émotionnel intense, une difficulté à structurer les événements, ou une crainte des conséquences.


1. Une parole souvent affectée par le contexte émotionnel

Plusieurs éléments peuvent expliquer l’absence de clarté ou de chronologie dans les propos de la victime présumée :

  • L’entretien intervient souvent dans un contexte d’anxiété, voire de souffrance psychique (burn-out, dépression...).

  • Le harcèlement en milieu professionnel, s’inscrit dans la durée, ce qui rend la datation des évènements difficile.

  • La parole peut être entravée par la peur de ne pas être crue ou par un sentiment de culpabilité.

Ces facteurs doivent être pris en compte, sans pour autant remettre en question la recherche de faits concrets.


2. Une exigence de précision qui peut produire un effet contre-productif

Lorsque l’enquêteur interroge frontalement sur les dates, les lieux ou les témoins, il peut involontairement créer une tension supplémentaire. Si cette exigence est posée trop tôt dans l’échange, la personne auditionnée peut se refermer ou douter de sa propre mémoire.

Dans plusieurs cas, nous avons observé que les victimes présumées expriment leur ressenti de façon globale (« j’étais mal à l’aise », « j’avais peur de venir travailler ») avant de parvenir à évoquer des faits plus circonstanciés.


3. Recommandations méthodologiques

Voici quelques pistes permettant de mieux adapter l’entretien sans compromettre sa rigueur :

  • Adopter une posture d’écoute active : reformuler, valider les émotions exprimées, sans interpréter.

  • Encourager la précision sans contrainte : « Est-ce que vous vous souvenez d’un moment en particulier qui illustre ce que vous venez de dire ? »

  • Accepter un récit non linéaire, puis revenir dans un second temps sur les repères temporels.

  • Prendre acte de l’incertitude : noter dans le rapport que les faits ne sont pas précisément situés, plutôt que d’imposer une datation artificielle.


4. Rendre compte fidèlement : un enjeu de déontologie

Il est essentiel de retranscrire la parole telle qu’elle a été énoncée, y compris dans ses hésitations ou ses manques. Forcer une précision absente risque de trahir le vécu de la personne auditionnée.

Ainsi, la mention « la personne évoque une situation de gêne persistante, sans parvenir à en dater précisément l’origine » est plus juste que toute reformulation supposant une chronologie inexistante.


Entretien victime présumée harcèlement
Entretien victime présumée harcèlement

Conclusion

Dans un contexte d’enquête interne, l’écoute de la personne se déclarant victime implique un équilibre entre accueil de la parole et exigence méthodologique. Le flou n’est pas synonyme de mensonge : il est parfois l’expression même d’une réalité complexe à verbaliser. C’est au professionnel de savoir en tenir compte dans sa démarche.

 
 
 

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