Quels documents analyser lors d’une enquête pour tentative de suicide au travail ?
- Anaïs Cejudo
- 17 nov.
- 2 min de lecture
Lorsqu’une tentative de suicide survient en lien présumé avec le contexte professionnel, la mise en place d’une enquête interne ou d’une expertise externe vise à comprendre les facteurs pouvant avoir contribué à l’acte.
Au-delà des auditions des personnes concernées, l’analyse documentaire constitue un levier essentiel pour reconstruire le contexte de travail, identifier des signaux faibles ou repérer des dysfonctionnements organisationnels.

1. Objectif de l’analyse documentaire
L’analyse des documents vise plusieurs finalités :
Reconstituer les événements précédant l’acte (périodes de tension, alertes, changements organisationnels) ;
Identifier d’éventuels signaux précurseurs (arrêts de travail, conflits, alertes informelles, sollicitations de la médecine du travail, etc.) ;
Analyser l’environnement de travail de la personne concernée, dans une approche systémique : management, charge, isolement, exposition aux incivilités…
Cette analyse ne vise ni à établir des responsabilités individuelles, ni à juger la légitimité de l’acte, mais à comprendre dans quelle mesure le travail a pu jouer un rôle.
2. Typologie des documents mobilisés
Les documents analysés peuvent être classés en plusieurs catégories. Ils sont sélectionnés en fonction de la situation et de la temporalité des faits.
🔹 Données RH et administratives
Fiche de poste / missions confiées
Historique des changements d’affectation ou d’équipe
Éléments d’absentéisme (arrêts, reprises)
Dossiers disciplinaires éventuels
Courriers ou entretiens RH récents
🔹 Données santé / sécurité / alerte
Courriers adressés au médecin du travail ou à la hiérarchie
Signalements à l’employeur ou au CSE
Comptes rendus CHSCT / CSSCT
Registre de santé et sécurité au travail
Alertes internes, fiches RPS, sollicitations du service social
🔹 Échanges professionnels écrits
Mails (en lien avec l’objet de la plainte ou la période critique)
Compte rendu de réunions d’équipe
Remontées d’incidents ou tensions (avec collègues, clients, hiérarchie)
🔹 Événements organisationnels
Planning, charge de travail, amplitude horaire
Réorganisations récentes
Changements de logiciel ou d’outil de gestion
Fusions, déménagements, suppressions de postes
3. Principes d’analyse et précautions
L’analyse ne se limite pas à la lecture des documents : elle est corrélée avec les éléments recueillis en entretien.
Elle se fait de manière chronologique, pour identifier des périodes de rupture ou de basculement.
Elle tient compte du cadre juridique de consultation des documents personnels ou sensibles, notamment pour respecter la confidentialité.
Il est essentiel de signaler que toute pièce produite est contextualisée et ne constitue pas en soi une preuve isolée.
Conclusion
L’analyse documentaire, lorsqu’elle est croisée avec les récits recueillis en entretien, permet de donner corps au contexte professionnel dans lequel la tentative de suicide s’inscrit. Elle complète l’approche clinique et relationnelle par une lecture plus structurelle du travail.
Elle est un outil d’objectivation essentiel pour formuler un diagnostic rigoureux et, le cas échéant, des préconisations adaptées.


Commentaires