Rapports sociaux dégradés : un indicateur silencieux du malaise organisationnel
- Anaïs Cejudo
- 25 août
- 2 min de lecture
Remarques acerbes en réunion, mises en copie inutiles dans les échanges de mails, collègues qui ne se saluent plus, tensions persistantes non régulées… Ces signaux, parfois banalisés ou considérés comme des “désaccords normaux”, traduisent en réalité un dérèglement plus profond des rapports sociaux au sein de l’entreprise.
Ces tensions interpersonnelles ne sont pas uniquement des “histoires de personnes” : elles sont souvent le symptôme visible de fragilités collectives, d’un manque de régulation managériale ou d’une désorganisation plus globale.
1. Comment repérer une dégradation des rapports sociaux ?
Voici quelques indicateurs fréquemment relevés lors de nos diagnostics ou enquêtes internes :
Communication évitante, silences durables entre collègues
Multitude de micro-conflits jamais régulés
Formulations passives-agressives dans les échanges écrits
Dégradation du climat en réunion (tensions, sarcasmes, paralysie)
Montée de l’ironie ou de la plainte comme mode d’expression
Disqualification fréquente de l’encadrement ou des fonctions support
👉 Ces signes ne sont pas isolés. Lorsqu’ils se multiplient, ils dessinent un climat social qui s’érode, au risque d’impacter durablement la coopération et la santé psychologique des équipes.
2. Ce que disent les rapports sociaux dégradés du fonctionnement de l’entreprise
Une détérioration des relations professionnelles n’est jamais uniquement relationnelle. Elle renvoie souvent à :
Une organisation sous tension : surcharge, manque de clarté, injonctions contradictoires
Un encadrement en difficulté : absent, sur-sollicité ou non formé à la gestion des conflits
Un sentiment de perte de sens : les salariés n’identifient plus les objectifs communs ni les leviers d’action
Une défaillance des espaces de régulation : réunions d’équipe inexistantes ou formelles, aucun lieu pour aborder les tensions
➡️ Ce que l’on perçoit comme des “mésententes” entre personnes témoigne souvent d’un défaut de cadre collectif, d’un pilotage désincarné ou d’une insécurité organisationnelle.
3. Quels sont les impacts sur les équipes ?
Les conséquences peuvent être multiples :
Baisse de la coopération, repli individuel
Usure émotionnelle (irritabilité, perte de patience)
Climat d’injustice ou de suspicion
Turn-over ou absentéisme
Sentiment d’isolement ou d’indifférence face à la souffrance
D’après le baromètre RPS ANACT 2023, 62 % des salariés exposés à des tensions interpersonnelles persistantes déclarent avoir pensé à quitter leur entreprise dans les 6 derniers mois.
4. Ce que la direction peut (et doit) faire
Ignorer les rapports sociaux dégradés, c’est laisser s’installer des mécanismes d’évitement, de repli ou de contournement, au détriment de la performance et du climat.
Quelques leviers d’action :
Restaurer des espaces de parole régulés (réunions d’équipe utiles, groupes de régulation, entretiens managériaux approfondis)
Former les encadrants à la régulation des tensions
Analyser les situations avec une entrée collective (diagnostic RPS, enquête sociale, entretiens croisés)
Réinterroger les règles implicites du collectif (prise de parole, droit au désaccord, reconnaissance, marges de manœuvre)

Conclusion
Des rapports sociaux dégradés ne sont pas anecdotiques. Ils ne relèvent pas uniquement du registre relationnel. Ils disent quelque chose de la manière dont l’entreprise fonctionne, arbitre, régule, fait coopérer ou non.
Prendre ces signaux au sérieux, ce n’est pas sur-réagir : c’est reconnaître que la qualité du lien professionnel est un indicateur de santé collective.